23 mars 2022
23 mars 2022
Robbe Van Hauwermeiren
Senior Investment Strategist
De toute évidence, les espoirs de la Russie d’une victoire rapide ne se réaliseront pas. Selon les États-Unis, l’objectif initial était une prise rapide de Kiev et le remplacement du gouvernement du président Zelensky par un gouvernement pro-russe. En bombardant constamment non seulement des cibles militaires stratégiques, mais malheureusement aussi et surtout des zones civiles, la Russie mène actuellement une guerre d'usure et veut faire pression à la table des négociations. Outre la neutralité et la démilitarisation de l’Ukraine, elle souhaite également la cession de certaines régions situées dans l’est et le sud du pays.
La démilitarisation et le retrait de Zelensky semblent peu probables en raison de la résistance ukrainienne. De plus, il est également impossible de forcer militairement la Russie à quitter le territoire ukrainien. Cela pourrait signifier qu’il faudra sans doute s’attendre à une longue confrontation si un cessez-le-feu n’est pas conclu à la table des négociations. Malheureusement, les perspectives actuelles ne sont pas très prometteuses. Certains craignent que la Russie essaie de gagner du temps pour intensifier ses opérations militaires et retarder l'application de nouvelles sanctions.
La visite du président Biden à Bruxelles devrait encore accroître la pression sur la Russie. Biden devrait annoncer de nouvelles sanctions et discuter de la poursuite d’aides militaires à l’Ukraine. Le renforcement de la défense européenne sera sans doute également abordé.
Face à la hausse des prix des matières premières, à l'inflation et à la volatilité des marchés boursiers, les clients se concentrent principalement sur la situation en Ukraine dans l’espoir qu’elle s'éclaircira. En général, il est tentant d’expliquer une situation économique par une cause unique. La réalité est plus complexe et résulte de l'interaction de nombreux facteurs. Sur le plan financier, la guerre en Ukraine a largement contribué à intensifier l’inflation. Depuis un certain temps, la hausse des prix a incité les banques centrales à resserrer leur politique. Les marchés obligataires et les bourses, qui avaient bénéficié de taux bas depuis des années, des programmes de rachat des banques centrales et, récemment, de mesures de relance budgétaire, ont dû s'adapter à ce régime plus strict au début de l’année et ont perdu une partie de leur valeur.
L'inflation est au centre de cette histoire. Pour mieux comprendre son origine, il faut remonter à 2015-2016, lorsque les prix du gaz et du pétrole ont chuté à des niveaux historiquement bas en raison d’une offre excédentaire mondiale. L'industrie pétrolière et gazière américaine s’est effondrée et certains investisseurs ont définitivement quitté le secteur. En 2018, la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine a déjà révélé des problèmes dans les chaînes d'approvisionnement mondiales. Progressivement, les entreprises ont commencé à chercher des alternatives - souvent plus coûteuses – aux fournisseurs chinois. La crise du Covid a a mis en lumière ces points sensibles. Pendant la pandémie, la demande de biens de consommation a considérablement augmenté, mais l’offre n'a pas pu à suivre, ce qui a provoqué une explosion des prix. Aussi, la production de pétrole a été fortement réduite au début de la pandémie avant d’être réintroduite que très progressivement sur le marché. La pénurie a fait grimper les prix de toutes les matières premières, ce qui s’est répercuté sur le produit final. Cette conjonction de facteurs explique la hausse de l’inflation.
La guerre en Ukraine entraîne de nouvelles perturbations des chaînes d'approvisionnement et une pénurie de matières premières. Les questions relatives à l’importation de pétrole et de gaz russes accentuent la pression sur les prix de l'énergie. En outre, l’Ukraine et la Russie sont d'importants exportateurs de céréales. Par exemple, de nombreux pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord dépendent des importations de blé ukrainien et russe. Le risque d’une hausse des prix des denrées alimentaires est donc bien réel. L’incertitude liée à la guerre complexifie un environnement économique déjà difficile pour les actions. Et pourtant, les marchés boursiers font preuve de résilience.
Au moment de la rédaction de cet article, les actions mondiales affichent une perte de -2,9% depuis le début de l'année (États-Unis: -2,7% ; Europe: -4,8%). Toutefois, ces chiffres sont peu révélateurs concernant la réaction des marchés à la guerre ukrainienne. Les craintes d'une flambée de l’inflation et la réaction des banques centrales ont fait chuter les actions de -7,4% entre le 1er janvier et le 24 février (USA: -8,3%; Europe: -9%). Depuis le 24 février, jour de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les actions ont augmenté de +4,9% (USA: +6,1%; Europe: +4,6%). Cela souligne l’impact de la guerre sur les marchés boursiers.1
L'histoire montre à chaque fois que les marchés sont incroyablement résistants et s'adaptent très rapidement à de nouvelles situations, souvent difficiles. Les actions ont augmenté de près de 6% au cours de la semaine où la Banque centrale américaine (Fed) a procédé à la première hausse des taux le 16 mars et a présenté un plan relativement agressif pour l’avenir. Après l’annonce des hausses de taux, le marché a subi une sévère correction mais a choisi de regarder vers l’avenir et de se concentrer sur les aspects positifs de la première hausse de taux. En effet, le Fed avait souligné que la vigueur actuelle de l’économie est capable d'absorber les nombreuses hausses de taux prévues. Belfius partage cette vision et est convaincue que l’économie mondiale restera relativement forte.
Plus que jamais, nous restons fidèles à nos convictions à long terme. Les sources d'énergie renouvelables sont le meilleur moyen de réduire la dépendance européenne vis-à-vis de l'approvisionnement énergétique de la Russie. La transition verte joue donc un rôle clé dans les convictions de Belfius. De plus, nous continuons à miser sur le développement d'une économie circulaire solide. Cela pourrait aider l’Europe à moins dépendre des importations de matières premières et ainsi mieux résister à la hausse des prix de celles-ci.
1Source: Refinitiv – datastream - Les rendements ont été calculés en EUR pour les MSCI All Countries World Index, MSCI USA Index, MSCI Europe Index.