Philip Marynissen, explique ce qu’impliquent les business models circulaires plébiscités par nos gouvernements: « Transformer une économie linéaire - avec des produits jetés après usage - en une économie circulaire - avec des produits et matériaux maintenus le plus longtemps possible dans le système - contribuera à notre avenir durable. »
Dans l’économie linéaire, les fabricants cherchaient à écouler un maximum de produits sur le marché. Dès lors, ces produits devaient avoir une durée de vie limitée. L’économie circulaire, quant à elle, se concentre d’une part sur la conception d’un bon produit, c’est-à-dire un produit qui répond à nos besoins, tout en utilisant aussi peu de matériaux que possible, et d’autre part sur la valorisation et la durée d’utilisation des matériaux. «Contrairement à l’économie linéaire, où de nombreux produits sont mis au rebut, l’une de nos tâches est de concevoir des produits durables et réparables pour passer d’une économie de recyclage à une économie circulaire», souligne Philip Marynissen. Selon lui, «cela devrait réduire la consommation et la production de nouveaux matériaux, éviter la déstabilisation des chaînes d'approvisionnement globales et la hausse des prix des matières premières.»
«L'innovation occupe une place centrale dans l'économie circulaire, et les entreprises doivent mettre en place un modèle de services pour conserver leur pertinence. Ce modèle assure que la propriété du produit reste entre les mains du fabricant et l'encourage à le concevoir de manière à ce qu'il soit réparable et durable. Le but est de préserver au mieux la valeur des matériaux dans notre économie. Cet objectif passionnant nécessite l'innovation, même si celle-ci est source d'incertitude. Mettre en place ce modèle d'affaires n'est donc pas facile pour une entreprise habituée à vendre des produits», explique Philip Marynissen. «Il faut soudain prévoir un service de réparation, transmettre un nouvel état d'esprit aux développeurs, adapter des contrats, etc. Il faut aussi réfléchir en termes de coût total de possession et plus simplement en prix d'achat. Bref, il y a tout un apprentissage à faire».
«Dans le monde du business, les opportunités sont nombreuses et la transition vers l'économie circulaire est inévitable», déclare Philip Marynissen. «En gérant les matériaux plus intelligemment, nous sommes en mesure de relever plusieurs défis, tels que le climat et la biodiversité. Le potentiel est énorme et les stratégies sont multiples. Cependant, il y a des risques liés à un modèle de revenus différent, et le secteur financier y prête une attention particulière». Pour soutenir ce secteur, Philip Marynissen a rédigé une publication proposant un aperçu des différents modèles économiques existants dans cette nouvelle économie, ainsi que les opportunités et les risques spécifiques qui y sont liés. Si les opportunités commerciales sont nombreuses, le financement est l’oxygène qui doit permettre de réaliser cette transition. VITO a identifié plusieurs leviers nécessaires pour effectuer cette transition dans des secteurs forts en Belgique tels que la chimie, la construction, la bioéconomie et la chaîne alimentaire. Le financement est l'un des leviers principaux.
«Les coûts liés à la transition vers l'économie circulaire varient considérablement en fonction du contexte, du secteur, de la maturité de l'entreprise, de sa taille et de ses ambitions.» Selon Philip Marynissen, «certaines stratégies peuvent être mises en place très facilement avec un coût d'investissement peu élevé. Une start-up aura beaucoup moins de frais qu'une grande entreprise qui doit brusquement tout changer, ou qu'une entreprise de construction qui travaille dans le secteur immobilier». Dans un modèle linéaire, la vente de produits génère immédiatement une trésorerie beaucoup plus importante que dans un modèle de service circulaire. Avec ce dernier, «on obtient une trésorerie récurrente, tout comme un retour sur investissement, mais ceux-ci sont répartis sur un plus long terme. Ce modèle est aussi plus sûr et renforce la relation avec le client, tout en offrant des avantages environnementaux et une fidélisation des clients. Aujourd'hui, il est donc crucial pour une banque de se préparer adéquatement pour pouvoir proposer une solution de financement appropriée dès que le projet sera "bankable".» Car si les coûts d’investissements peuvent être plus élevés dans le cadre d’une économie circulaire, ceux-ci peuvent être rapidement récupérés via les nouveaux services proposés dans ce type de modèle.
«Le secteur financier, y compris chez Belfius, montre un intérêt croissant pour la transition vers l'économie circulaire et recherche des solutions de financement créatives. «La dynamique dans ce domaine n'a jamais été aussi grande, en raison de la réglementation européenne et des chaînes d'approvisionnement défaillantes, avec des prix élevés des matériaux, etc.», explique Philip Marynissen. Il y a actuellement un grand besoin de capital-risque pour les start-ups qui favoriseront encore des changements majeurs dans l'économie circulaire. Le secteur financier se prépare activement à répondre à ces besoins et il est également important de se concentrer sur certains secteurs spécifiques. Belfius, par exemple, possède plus d'expérience dans certains domaines sectoriels. Il est donc judicieux d'examiner comment la transition vers l'économie circulaire peut être mise en œuvre dans ces secteurs où nous avons déjà acquis des connaissances.»
Philip Marynissen
Expert en économie circulaire et en émissions industrielles
Qui est Philip Marynissen?