Dans le cadre de la réforme du droit patrimonial du couple, le législateur a voulu apporter aux (futurs) époux qui désirent opter pour un régime de séparation des biens la possibilité de renforcer la solidarité entre eux en apportant une protection plus importante à l’époux le plus faible, via la création d’un régime matrimonial supplémentaire (une variante «adoucie» du régime de la séparation des biens).
Le régime de séparation de biens avec participation aux acquêts
Dans un régime de séparation pure et simple des biens, tous les revenus (professionnels, mobiliers, immobiliers...) des époux, ainsi que leurs dettes, leur appartiennent personnellement. Ce régime est fréquemment choisi par les indépendants, qui peuvent ainsi protéger leur conjoint d’une éventuelle faillite. Le revers de la médaille est que, en cas de divorce ou de décès d’un des époux, celui qui n’a que peu ou pas de revenus, parce qu’il s’est par exemple consacré à l’éducation des enfants et n’a pas travaillé durant une partie importante de sa vie, sera lésé car il ne se sera pas constitué de capital durant le mariage.
L’exemple classique est celui de Pierre et Hélène: ils sont mariés depuis 30 ans, sous le régime de séparation des biens pure et simple et ont trois enfants. Lorsqu’ils se sont mariés, ni l’un ni l’autre n’avait de patrimoine. Pierre a fait une très belle carrière en tant que cardiologue tandis qu’Hélène a cessé de travailler à la naissance de leur premier enfant, pour s’occuper de la maison et de l’éducation des enfants, et par la suite, elle a effectué, à titre bénévole, des formalités administratives du cabinet de son mari.
A 55 ans, Pierre et Hélène décident de divorcer. Le patrimoine propre d’Hélène est très limité (50.000€). En revanche, le patrimoine de Pierre est confortable (200.000€, issus principalement de son activité professionnelle, ainsi que la maison familiale, d’une valeur de 500.000€, qu’il a intégralement financée). En vertu de leur régime matrimonial, Hélène n’a en principe aucun droit sur le patrimoine de Pierre et risque de se retrouver dans une situation financière difficile après leur séparation.
Le nouveau régime prévoit une séparation des biens avec participation aux acquêts. Cela signifie que les patrimoines restent séparés durant le mariage, mais, qu’en cas de divorce ou de décès, les acquêts (c’est-à-dire principalement les revenus) réalisés pendant le mariage sont partagés entre les époux, sur base d’un pourcentage déterminé par les époux dans leur contrat de mariage.
De cette manière, les conjoints peuvent opter pour plus de solidarité entre eux, tout en conservant les avantages du régime de la séparation des biens (par ex. la protection du patrimoine familial ou la protection contre des créanciers professionnels).
Si Pierre et Hélène avaient réalisé un contrat de séparation de biens avec participation aux acquêts, prévoyant une clé de répartition 50/50, la situation aurait été la suivante lors du divorce: sur base du contrat de mariage, le juge aurait établi que Pierre a «gagné» 700.000€ durant le mariage tandis qu’Hélène n’a «gagné» que 50.000€. Ensemble, le couple a donc gagné 700.000€ + 50.000€, soit 750.000€. La clé de répartition choisie étant de 50/50, ils ont tous les deux droit à 375.000 euros. Vu que Hélène disposait de 50.000€, Pierre devra encore lui payer 325.000€.
Il faut noter que la participation aux acquêts porte uniquement sur les revenus du conjoint et non sur ses éventuelles pertes, ce qui est la caractéristique principale d’un régime de séparation de biens. Cela signifie donc que le décompte final (au moment du divorce ou du décès) ne prend, en principe, pas en compte les dettes respectives des époux.
Ce nouveau régime matrimonial permet donc aux époux d’accorder, de commun accord, un filet de sécurité à l’époux économiquement le plus faible.
Une clause de participation aux acquêts peut également (en Wallonie et à Bruxelles uniquement) procurer un avantage fiscal non négligeable en cas de décès du conjoint le plus fortuné. En effet, tout ce que le conjoint survivant recueille en vertu de la clause de participation aux acquêts sera en principe exonéré de droits de succession.
Il est possible d’opter pour ce régime soit lors de votre mariage, soit par après, via une modification de votre contrat de mariage auprès de votre notaire.
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