Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
Véronique Goossens
Chief Economist @Belfius
La Bank of England souffle le chaud et le froid dans ses nouvelles prévisions concernant l’économie britannique. D’abord la bonne nouvelle: le choc économique lié à la crise du Covid-19 en 2020 semble moins grave qu’envisagé. La Banque centrale table pour cette année sur un repli du PIB de ‘seulement’ 9,5%. En mai, un précédent exercice prévisionnel laissait craindre un gouffre économique de 14%. En juillet, les dépenses des consommateurs se sont en effet plus redressées que prévu, aidées par les mesures de crise fiscales et monétaires du gouvernement. Les programmes de subventions salariales sont massivement utilisés pour les employés et les petits indépendants, ce qui permet d’éviter une flambée du taux de chômage comme aux États-Unis. Ces subventions salariales prendront cependant fin à l’automne et l’économiste en chef Andy Haldane tient encore compte d’une hausse du chômage à 7,5%, mais bien inférieure aux 10% craints en mai.
La mauvaise nouvelle est qu’il faudra plus de temps pour retrouver le niveau de vie d’avant la crise. Pour l’an prochain, les perspectives de croissance sont ramenées à 9% (15% en mai) et ce n’est qu’au plus tôt fin 2022 que l’économie britannique parviendra à atteindre le niveau de production de la fin 2019. La croissance de la productivité économique et des investissements des entreprises restera médiocre probablement pour plus longtemps.
La capacité de production excédentaire et l’incertitude planant sur le virus freinent les projets à long terme des entreprises et des consommateurs. En outre, la Banque centrale souligne dans son rapport que ses perspectives restent exceptionnellement incertaines. Tout comme chez nous, le R.-U. est de nouveau confronté à une augmentation du nombre de contaminations et des confinements locaux ont été récemment proclamés à Leicester et à Aberdeen, en Écosse.
La Banque centrale a actualisé ses prévisions à la suite d’une réunion monétaire mais, comme prévu, elle n’a pas modifié le taux directeur. Les dirigeants politiques ont décidé à l’unanimité de laisser le taux de base à 0,1% et de ne pas modifier le vaste programme de rachat d’obligations. La Bank of England ne cède donc provisoirement pas à la pression de faire baisser le taux officiel sous la barre de zéro pour cent, comme l’ont fait la BCE et la Bank of Japan. Selon le gouverneur Bailey, les taux négatifs figurent dans la boîte à outils de la Banque centrale mais elle n’envisage pas de les utiliser. Par le passé, la Bank of England a été un fervent opposant d’une telle politique de taux car elle pouvait être néfaste pour les investisseurs et la rentabilité du secteur financier. Mais la persistance de la crise du Covid-19 et les risques de baisse de la croissance contraignent la Banque centrale à laisser entrouverte la porte des taux négatifs.