Nicolas Deltour
Head of Investment Strategy
Philippe Evrard
Investment Strategy
22 mars 2023
Nicolas Deltour
Head of Investment Strategy
Philippe Evrard
Investment Strategy
L’Inflation Reduction Act (IRA) est une loi américaine promulguée par Joe Biden le 16 août 2022 qui a généré pas mal de commentaires de ce côté-ci de l’Atlantique, notamment pour ses côtés protectionnistes. Cette loi très ambitieuse doit faire face aux réalités macro-économiques américaines du moment.
L’IRA est le plus grand plan de relance de l’histoire des États-Unis. Il consacre entre autres près de 400 milliards de dollars de fonds fédéraux aux énergies propres, dans le but de réduire considérablement les émissions de carbone du pays d'ici la fin de la décennie. Les fonds seront distribués sous la forme d'incitations fiscales, de subventions et de garanties de prêts.
Au niveau des dépenses vertes prévues :
Mais ce plan vise également d’autres objectifs que le climat et consacre des budgets importants à d’autres politiques :
Au niveau des revenus sur une période de 10 ans :
Bref, un méga-plan qui vise in fine un triple objectif : climatique, industriel et de sécurité nationale.
Ce plan porte très mal son nom. Ses impacts présumés sur l’inflation sont minimes. Au mieux, il permettra de limiter l’inflation importée en poussant le développement de la production sur le sol américain. Il confirme surtout le grand retour du souverainisme et du protectionnisme. Il traduit aussi la volonté américaine de retrouver ou renforcer une forme d’indépendance dans les domaines les plus stratégiques, tel que l’énergie.
Ce plan marque un grand coup contre le réchauffement climatique, en subsidiant notamment massivement l’électrification de sa mobilité. Mais la production de métaux rares est également prise en compte, de sorte à s’affranchir de la dépendance chinoise. L’IRA prévoit de limiter l’impact environnemental de cette production de métaux rares, extrêmement polluante et impactante pour la biodiversité.
Le marché du travail américain est à l’heure actuelle en surchauffe. Le taux de chômage est extrêmement bas (3.6%) et connaît de nombreuses pressions inflationnistes, même si celles-ci sont pour le moment contenues. Par contre, l’IRA prévoit la création massive de jobs manufacturiers qui sont partis ces dernières décennies vers d’autres pays où le coût de la main d’œuvre était moins élevé. Ce double objectif (relocaliser des emplois et maintenir un coût du travail tant abordable que décent), s’il se concrétise, prendra du temps pour s’installer durablement.
Le contexte actuel de taux élevés a une répercussion sur le taux d’investissement des entreprises1 qui a naturellement fortement chuté. Investir maintenant nécessite d’emprunter à un coût plus élevé. Les mesures de subventions prévues dans l’IRA vont-elles contrebalancer suffisamment l’impact négatif des hausses de taux pour inciter les entreprises à réinvestir ?
De plus, la réalité politique américaine fait que ce plan prévu pour plusieurs années ne pourrait pas perdurer en cas de changement de majorité. Les difficultés rencontrées lors de l’Obamacare sont encore bien présentes dans les mémoires… De plus, la dette publique élevée supporterait-elle ce plan ambitieux ?
Et quid de l’inflation actuelle ? Celle-ci érode les budgets disponibles en gonflant les coûts des salaires, des matières premières, de la construction.
L’Union Européenne et d’autres pays partenaires des USA voient dans l’IRA de nombreuses mesures protectionnistes contraires aux règles de l’OMC. Par exemple, deux tiers des projets d’usine à batterie en Europe sont menacés par les charmes de l’IRA2. L’UE a sorti depuis lors une série de plans dont celui concernant le rapatriement ou le maintien d’industries stratégiques sur le sol européen ou celui permettant d’avoir une vue sur les matériaux rares (le « critical raw materials act ») qui font écho à l’IRA. Mais ce début d’escalade protectionniste est-il bon pour l’objectif sous-jacent partagé de part et d’autre de l’Atlantique, à savoir transformer nos sociétés vers plus de résilience ?
1Source : Capital Economics
2Source : Transport & Environnement
Ce document, rédigé et publié par Belfius Banque, donne la vision de Belfius Banque sur les marchés financiers. Il ne contient pas de conseil en investissement personnalisé, pas de recommandation d’investissement, ni de recherche indépendante en matière d’investissement. Si vous êtes à la recherche de conseils en investissement personnalisés, vous pouvez vous adresser à votre conseiller financier qui se fera un plaisir d’examiner avec vous les effets