9 septembre 2022
Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
Véronique Goossens
Chief Economist @Belfius
La plus forte hausse de taux depuis l’introduction de l’euro est intervenue. La BCE majore ses taux directeurs d’un coup de 0,75 pour cent. Le taux de dépôt auquel les banques confient leur argent à court terme passe ainsi de zéro à 0,75 pour cent. Le taux de refinancement et le taux de prêt marginal s’affichent à présent à 1,25 et 1,50 pour cent. Les banques peuvent emprunter de l’argent pour un jour ou une semaine à ces tarifs auprès de la BCE.
Cette hausse de taux jumbo est nouvelle pour la BCE qui opérait auparavant en plus petites étapes. Cependant, l’annonce faite hier n’a pas surpris les marchés financiers. Après le rapport exécrable sur l’inflation d’août, une hausse de taux plus limitée aurait été considérée comme décevante. En juillet, le taux avait déjà été augmenté de 0,50 pour cent, mais la BCE accuse encore toujours un sérieux retard dans ce domaine sur les banques centrales américaine et britannique.
Francfort aura donc encore du pain sur la planche dans les prochains mois. Selon la présidente Lagarde, la BCE continuera à rehausser les taux parce que l’inflation est «beaucoup trop élevée» dans la zone euro et qu’elle restera supérieure à l’objectif de 2 pour cent pour une plus longue période. C’est ce que montrent aussi les prévisions d’inflation en forte hausse de la BCE. Elles tablent à présent sur une inflation de 8,10 pour cent en 2022, 5,50 pour cent l’an prochain et 2,30 pour cent en 2024.
Lors de sa conférence de presse, Lagarde est restée vague quand la question a été posée de savoir à quelle vitesse et jusqu’à quel niveau la BCE voulait augmenter les taux. Elle a néanmoins déclaré que le resserrement de la politique monétaire pouvait durer de 3 à 5 réunions avant que la banque n’envisage une pause. Cela signifie que la BCE appuiera sur la pédale de frein au moins jusqu’au printemps de l’an prochain.
La BCE ne se laissera ainsi pas décontenancer lorsque la croissance économique se rafraîchira dans la zone euro. Outre la révision à la hausse des prévisions d’inflation, les perspectives de croissance ont été adaptées hier, mais malheureusement dans l’autre sens. Pour 2022, une croissance du PIB de 3,10 pour cent est encore prévue, mais elle retombera à 0,90 pour cent l’an prochain. Les hausses de prix astronomiques de l’énergie pèsent lourdement sur le pouvoir d’achat des ménages et sur les marges bénéficiaires des entreprises. De récentes données indiquent déjà un fort ralentissement de l’activité, de sorte que la BCE tient compte d’une stagnation de l’économie européenne plus tard dans l’année et au premier trimestre de 2023.
En dépit du danger accru d’inflation, la BCE reste résolument décidée à lutter contre l’inflation élevée en augmentant ses taux. Elle entend ainsi surtout faire diminuer les prévisions d’inflation. Si les citoyens et les entreprises pensent que l’inflation élevée est permanente, les travailleurs vont demander une hausse des salaires et les employeurs majoreront à leur tour les prix. La BCE veut éviter à tout prix la spirale salaires-prix qui s’amorce.
Les marchés financiers ont réagi modérément positivement à la politique des taux ainsi dessinée, mais entre-temps, les risques d’inflation restent orientés à la hausse à court terme. Les majorations de taux seules ne sont en effet pas suffisantes pour éteindre tous les foyers d’inflation en Europe. Une hausse des taux n’engendre ainsi pas une diminution immédiate des prix de l’énergie. Dans ce domaine, tous les regards se tournent vers une autre réunion de haut niveau, la réunion extraordinaire des ministres européens de l’énergie qui débutera aujourd’hui.
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