17 mars 2023
Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
Véronique Goossens
Chief Economist @Belfius
Hier, la Banque centrale européenne (BCE) a clairement laissé entendre qu’elle veut continuer à augmenter le taux en dépit de l’inquiétude sur les marchés financiers. La BCE augmente à nouveau les taux de base de 50 points de base. Le taux des dépôts s'établit ainsi à 3,0 pour cent.
Sur le plan de la liquidité, la Banque centrale n’entrevoit pas de problème dans la zone euro. Il existe en outre un grand éventail d’instruments stratégiques pour injecter suffisamment de liquidités dans le système financier.
Les responsables de la politique monétaire à Francfort se sont réunis hier dans un climat très instable sur les marchés d'actions et d'obligations. Vendredi dernier, la Silicon Valley Bank et deux autres petites banques ont plongé aux USA. Les actions bancaires du monde entier se sont retrouvées sous pression et les investisseurs ont trouvé refuge dans des investissements sûrs, comme l’or et les obligations souveraines. Les régulateurs américains ont dû venir à la rescousse pendant le week-end pour éviter la panique, en assurant que les épargnants récupéreraient leur argent. Les marchés financiers avaient à peine retrouvé leur calme quand la nouvelle est tombée que le Crédit Suisse, la deuxième plus grande banque de Suisse, a de graves problèmes. La banque subit des pertes considérables depuis deux ans et son cours boursier est mis à mal depuis des années. En plein milieu de l'inquiétude des banques la semaine dernière, à cela s’est ajoutée la nouvelle que son principal actionnaire ne veut pas continuer à investir dans la banque. La vente des actions bancaires a donc repris de plus belle, jusqu’à ce que la Banque centrale suisse adopte aussi une solide mesure d'urgence. Le Crédit Suisse en difficultés a reçu un prêt de 50 milliards de francs suisses pour relever sa liquidité. De ce fait, la confiance des investisseurs a pu se rétablir quelque peu à l’approche de la réunion de la BCE.
Mais la nervosité persiste quand même concernant le secteur bancaire. Les problèmes du Crédit Suisse sont complètement différents de ceux de la Silicon Valley Bank. Mais ils rappellent qu’au fur et à mesure que le taux augmente, les vulnérabilités du système financier se dévoilent. Pendant des mois, les investisseurs avaient fait fi de la menace que représente la hausse des taux d'intérêt. Le stress des banques aux USA et en Suisse a changé la donne cette semaine. Cela a alimenté les spéculations sur une plus petite augmentation des taux de 25 points de base. La BCE est attentive aux tensions sur les marchés, mais sa première préoccupation est encore de réduire l'inflation élevée. C’est pourquoi la Banque centrale a quand même opté pour une augmentation du taux de 50 points de base. Jusqu’en juin, la BCE va également poursuivre la cessation progressive de ses achats obligataires, comme prévu.
Sur le plan de la liquidité, la Banque centrale n’entrevoit pas de problème dans la zone euro. Il existe en outre un grand éventail d’instruments stratégiques pour injecter suffisamment de liquidités dans le système financier. La situation est également fondamentalement différente de celle de 2008. Le secteur bancaire de la zone euro est beaucoup mieux armé contre les chocs financiers, grâce à de solides réserves de capitaux et de liquidités.
Durant la conférence de presse, la présidente Lagarde a déclaré que la décision concernant le taux d'intérêt a été adoptée à une large majorité, en dépit du stress plus élevé. En effet, l'inflation se maintient à un niveau élevé trop longtemps. À la suite de la baisse des prix de l’énergie, l'inflation générale s’est déjà atténuée cette année, mais l'inflation structurelle, qui ne tient pas compte des prix de l'énergie et de l’alimentation, continue à augmenter. En février, elle s’élève à 5,6 pour cent. Les prix augmentent encore, tant dans l'industrie que dans les entreprises de services. La Banque centrale révise à la baisse à 5,3 pour cent ses prévisions concernant l'inflation générale pour 2023 mais elle augmente par le même temps ses attentes concernant l’inflation structurelle moyenne cette année à 4,6 pour cent. De même, les perspectives de croissance économique en 2023 ont été corrigées à la hausse en raison de la diminution des prix de l’énergie et grâce à l’activité industrielle qui résiste mieux que prévu au premier semestre.
La BCE n’a pas indiqué le nombre de hausses de taux qu’elle envisage encore. Ces prochains mois, toutes les décisions en matière de taux prises à Francfort se baseront uniquement sur les chiffres économiques, surtout concernant l'inflation sous-jacente. Après la décision concernant le taux annoncée hier, les marchés monétaires s'attendent à ce que la BCE augmente le taux de 25 points de base encore une fois ces prochains mois, à 3,25 pour cent. Ce niveau est largement inférieur aux attentes au début du mois, quand on tablait encore sur un taux BCE de 4,00 pour cent. Cela démontre l’énorme volatilité des marchés de taux. Ces derniers jours, les taux tant à court qu’à long terme fluctuaient dans tous les sens. Ce vendredi matin, il semble que le calme soit revenu. Les actions bancaires se rétablissent, les indices boursiers importants sont dans le vert. Les marchés de taux semblent également retrouver leur équilibre. Les marchés ont rendez-vous avec la Banque centrale américaine la semaine prochaine. Il semble qu’une hausse de taux de 0,25 pour cent s'annonce, comme il fallait s’y attendre.
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