Vague d’optimisme aux États-Unis

17 janvier 2025

Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius


Véronique Goossens
Chief Economist @Belfius

Partagez cet article:  

Depuis la victoire électorale de Donald Trump et des républicains, le sentiment économique est en hausse aux États-Unis. Si la confiance des consommateurs s’est légèrement émoussée en décembre, son niveau reste plus élevé qu’avant les élections. C’est surtout la confiance des dirigeants d’entreprise américains qui s’est nettement améliorée ces derniers mois.

Le programme de Trump en faveur des entreprises, caractérisé par moins de régulation et par la promesse d’une baisse des charges fiscales d’exploitation, est clairement en train de faire son chemin. Les projets des entreprises visant à augmenter la production au cours des prochains trimestres et à renforcer les investissements ont atteint leur niveau le plus élevé depuis 2021.

Le secteur des services tourne à plein régime depuis un certain temps, mais le mois de décembre a aussi été marqué par un vent d’optimisme concernant l’activité des usines. Les entreprises manufacturières américaines enregistrent un rebond des commandes pour la première fois depuis le début de l’année dernière. Sur le marché du travail, la demande se redresse après des rapports sur l’emploi moins optimistes à l’automne.

En 2024, la croissance économique américaine a de nouveau dépassé les prévisions de la plupart des analystes. D’après les chiffres disponibles, l’économie devrait connaître une croissance de 2,8% en glissement annuel, alors qu’en septembre de l’an passé, la banque centrale de Washington ne prévoyait qu’une croissance de 2%.

L’optimisme à l’égard de la croissance économique américaine présente aussi un inconvénient, à savoir le risque d’une hausse de l’inflation. Les baisses prévues de l’impôt sur les sociétés et les revenus, une politique d’immigration plus stricte et des tarifs d’importation potentiellement élevés intensifieront l’inflation des prix à la consommation. À partir de la mi-2025, nous estimons que l’inflation s’accélérera pour atteindre 3% si Trump met à exécution son projet de taxer plus lourdement les produits étrangers. Les attentes en matière d’inflation sur les marchés financiers américains ont également été gonflées ces dernières semaines et les taux d’intérêt à long terme ont augmenté.

Le risque d’une inflation élevée a également un impact sur la politique monétaire de la Réserve fédérale, la banque centrale des États-Unis. Les procès-verbaux de la réunion de décembre sur les taux d’intérêt révèlent qu’une majorité du comité des taux d’intérêt est devenue plus prudente et plus sobre en ce qui concerne les baisses de taux d’intérêt prévues au cours de cette année. Le maintien de la baisse de l’inflation récemment espéré par la banque centrale est devenu moins réaliste. Nous nous attendons dès lors à ce que la banque centrale marque une pause au niveau des taux d’intérêt jusqu’au printemps, et ce afin d’éviter d’échauffer davantage l’économie et de limiter le risque d’une hausse de l’inflation.

Les perspectives de croissance dans la zone euro restent minces.

Le contraste avec la situation économique dans la zone euro est saisissant. Les indicateurs de confiance des entreprises et des consommateurs continuent d’indiquer une croissance économique modérée. Le secteur européen des services continue d’enregistrer une hausse de l’activité, mais de vastes pans de l’industrie fonctionnent bien en deçà de leur capacité habituelle.

Alors que les entreprises américaines considèrent le second mandat de Trump comme positif pour les chiffres d’affaires et les bénéfices, les dirigeants d’entreprise européens voient majoritairement d’un mauvais œil l’impact économique de la seconde présidence de Trump. La présence de Donald Trump à la Maison Blanche accentue les risques de tensions géopolitiques, de ralentissement de la croissance du commerce mondial et d’une baisse des volumes d’exportation européens, en particulier dans l’industrie automobile (Trump ayant menacé de taxer plus lourdement les importations de voitures). En ce qui concerne les prix de l’énergie, le handicap des coûts par rapport à ceux des États-Unis reste important. La récente hausse des prix du gaz sur les marchés européens, qui ont dépassé les niveaux de l’année précédente, signifie que les entreprises industrielles de la zone euro paient actuellement le gaz pratiquement cinq fois plus cher que leurs concurrents américains.

La confiance des consommateurs s’est également affaiblie dans la plupart des États membres de la zone euro ces derniers mois. La situation financière et la demande future sur le marché du travail sont désormais plus incertaines. Au cours de la période 2022-2024, la croissance de l’emploi dans la zone euro a été nettement plus marquée que la croissance sous-jacente de l’économie. Malgré les nombreux goulets d’étranglement sur le marché du travail, la demande de main-d’œuvre est restée soutenue. En même temps, le taux d’emploi a augmenté depuis 2021. Cela a permis de maintenir le chômage dans la zone euro à un niveau historiquement bas. D’après une analyse récente (*) de la BCE, cette situation est plutôt exceptionnelle. Ces prochaines années, les chercheurs estiment que le marché du travail restera résilient, mais que la croissance de l’emploi sera davantage en phase avec la croissance économique. Nous prévoyons donc une légère augmentation du taux de chômage dans la zone euro, qui devrait passer de 6,3 à 6,5% en 2025.

L’inflation dans la zone euro a de nouveau augmenté en décembre, passant de 2,2% en novembre à 2,4%. La principale raison de cette augmentation est une contribution plus importante des prix des carburants. Au début de cette année, l’inflation dans le secteur de l’énergie devrait à nouveau diminuer, en raison des prix élevés de l’énergie au cours du premier trimestre de 2024. En même temps, l’inflation des produits alimentaires devrait reprendre cette année à la suite de la hausse des prix des cultures agricoles sur les marchés des matières premières. L’inflation sous-jacente (qui ne tient pas compte des prix de l’énergie et de l’alimentation) devrait diminuer au cours de l’année 2025 en raison de la faible croissance de l’économie européenne. Il nous semble ainsi que la BCE devrait normalement pouvoir continuer à réduire son taux directeur de 3,0 à 2,0% au cours de l’année 2025.

En Chine aussi, la banque centrale semble bien décidée à continuer à réduire les taux d’intérêt pour soutenir la croissance économique. Ces derniers mois, les exportations chinoises sont passées à des niveaux plus élevés. De nombreuses entreprises exportant vers le reste du monde anticipent une nouvelle guerre commerciale sous le nouveau mandat de Trump et tentent d’exporter le plus possible avant son investiture. À l’heure actuelle, l’économie chinoise bénéficie aussi d’un soutien fiscal considérable de la part des autorités ce qui, à court terme, booste les chiffres de croissance. Cela dit, des facteurs structurels, tels que la faible demande des consommateurs et la crise persistante sur le marché immobilier, combinés à un recul des exportations, commenceront à peser sur la croissance de l’économie chinoise dans le courant de l’année.

Source (*): Explaining the resilience of the euro area labour market between 2022 and 2024, ECB Economic Bulletin Issue 8, 2024 («Comprendre la résilience du marché du travail de la zone euro entre 2022 et 2024», Bulletin économique de la BCE, n° 8/2024)

Source générale: Belfius Research

Ce document, rédigé et publié par Belfius Banque, donne la vision de Belfius Banque sur les marchés financiers. Il ne contient pas de conseil ou de recommandation d’investissement personnalisé(e), ni d’analyse indépendante en matière d’investissement. N’hésitez pas à contacter votre conseiller financier si vous désirez recevoir des conseils d’investissement personnalisés. Il se fera un plaisir d’examiner avec vous les conséquences éventuelles de cette vision sur votre portefeuille personnel d’investissements. Les chiffres mentionnés reflètent une situation à un moment donné et sont susceptibles d’être modifiés.

Les rendements du passé, les simulations de rendements du passé et les prévisions de rendements futurs d’un instrument financier, d’un indice financier, d’une stratégie ou d’un service d’investissement ne constituent pas des indicateurs fiables des rendements futurs. Les rendements bruts peuvent être influencés par des commissions, frais et autres charges. Les rendements libellés dans une autre devise que celle de l’État de résidence de l’investisseur sont soumis à des fluctuations du cours du change, qui peuvent avoir un impact positif ou négatif sur les plus-values.

Partagez cet article: